Troisième Rome (Moscou)
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Pour le concept de Troisième Rome en général, voir Troisième Rome.
L’expression « Moscou, troisième Rome » (en russe : Москва—третий Рим) résume une théorie politique postulant que Moscou, devenue capitale du plus puissant État indépendant orthodoxe, aurait hérité, après la chute de Constantinople (« deuxième Rome ») en 1453, de la mission de protéger les traditions de la Rome impériale (« première Rome ») et la foi orthodoxe.
Cette théorie justifiait d’une part le pouvoir absolu du souverain, et d’autre part le rôle de gardiens de la foi orthodoxe des Patriarches russes, sur le modèle byzantin dont Moscou adopta l’emblème (aigle bicéphale), le titre de « tsar » (dérivé du titre romain de « César » dont dérive aussi le titre germanique de « Kaiser ») et les rites du couronnement. Cette théorie commença à circuler dès le milieu du XVe siècle, mais trouva son expression définitive au siècle suivant dans trois lettres écrites par le moine Philothée (Filofeï) de Pskov au grand prince de Moscou, Ivan III, à son successeur, Vassili III (1505-1533), et au nouveau gouverneur de Pskov, M. G. Misiour-Mounekhine.
Ses défenseurs la légitimaient par le mariage d’Ivan III avec la princesse Zoé Paléologue, nièce du dernier empereur romain d’Orient mort en défendant Constantinople : Constantin XI Dragasès. Élaborée et entretenue dans les milieux ecclésiastiques, cette théorie ne reçut que peu d’attention des cercles politiques sinon pour justifier le pouvoir absolu des souverains et, sur le plan de la politique intérieure russe, finit par se voir vidée de sens lorsque Pierre Ier décida d’européaniser le pays et de transférer sa capitale de Moscou à Saint-Pétersbourg.
En revanche, sur le plan de la politique extérieure de l’Empire russe, elle continua à servir, d’abord dans le « projet grec » de Catherine II, Grigori Orlov et Eugène Voulgaris, ensuite dans celui de « Nouvelle-Russie » rechristianisant les rives de la mer Noire prises à l’Empire Ottoman puis, de pair avec le panslavisme, dans le « Grand Jeu » et la « Question d'Orient » à travers la défense des sujets chrétiens orthodoxes des Sultans ottomans[1].